L'ARES reçoit le Doctorat Honoris Causa à l'UNILU. L'interview du recteur Kishiba Fitula

Docteur en droit, le professeur Gilbert Kishiba Fitula est le recteur de l’Université de Lubumbashi (UNILU), depuis 2015. À l’occasion du titre décerné à l’ARES et au VLIR-UOS, il partage sa vision de la coopération avec les partenaires académiques belges, ainsi que son ambition de la voir renforcée mais aussi de la faire évoluer.

Quelle est la motivation de l’UNILU d’accorder ce doctorat Honoris Causa à l’ARES et au VLIR-UOS ?

L’UNILU est une excroissance en terre congolaise et africaine des universités belges. En effet, l’Université libre de Bruxelles (ULB), l’Université de Liège (ULiège) et l’Université de Gand ont été, en 1956, d’une aide remarquable à la création de l’Université Officielle du Congo et du Ruanda-Urundi à l’époque, Université de Lubumbashi aujourd’hui. Cette filiation est restée intacte tout au long de notre histoire. 

Ainsi, plusieurs générations d’enseignant·es, plusieurs personnalités qui ont géré et gouverné la République démocratique du Congo (RDC) ont bénéficié de cette coopération avec la Belgique. Ces collaborations s’inscrivent dans le cadre d’accords avec le VLIR-UOS et l’ARES qui ont permis d’assurer une relève académique de qualité, de créer des opportunités de mobilité académique et de bénéficier de séjours prolongés et intermittents des chercheur·es.

Par l’entremise de cette coopération, nous avons pu obtenir les meilleures orientations, l’appui aux facultés du point de vue de la qualité des enseignements et des curricula. Trois exemples parmi tant d’autres soulignent la richesse de ce partenariat : la création du département d’électromécanique à la Faculté polytechnique, la création de l’École de criminologie et la création de la Faculté d’architecture.

Notons aussi que près de la moitié du corps professoral de l’UNILU, toutes disciplines confondues, a été formé dans les universités belges. Consolidant la qualité de la recherche, ce personnel académique a énormément aidé les universités congolaises à assurer des services de qualité à la société.

Tout au long de notre histoire commune, nous avons été et sommes portés à agir ensemble pour envisager un destin rayonnant de nos deux nations.

Cette coopération nous aura permis de mieux comprendre ce qu’est la Belgique d’aujourd’hui et de demain, et, réciproquement, ce qu’est la RDC d’aujourd’hui et de demain.

Cette meilleure connaissance mutuelle a scellé une amitié durable. L’UNILU, l’ARES et le VLIR-UOS sont quasiment une famille. Nous avons appris à agir ensemble, de commun accord, afin d’envisager un avenir commun.

La visite du Roi Philippe à l’Université de Lubumbashi et notre invitation au Palais royal à Bruxelles sont remarquables à ce propos. Ces deux moments confirment que l’UNILU est une université rayonnante et attentive à ce que la Belgique peut faire pour la RDC.

Par ce doctorat Honoris Causa, l’UNILU veut que la Belgique occupe toute la place qui lui revient, qu’il lui faut et qu’elle vaut par rapport à la RDC d’aujourd’hui et de demain. Entendu que dans le concert des nations, ce partenariat entre la RDC et la Belgique est une force et un atout réciproque et mutuel.

Quelle est la vision à moyen et à long terme de l’UNILU envers ces deux partenaires ?

À court terme, la vision est de réaliser avec performance et efficience les programmes tels que définis avec les partenaires belges, mais aussi les élargir dans la perspective de la réforme académique et scientifique et ainsi obtenir des résultats par rapport aux bourses d’études.

Notre vision est aussi de renforcer les capacités de recherche et d’élaboration de projets de recherche dans l’optique de leur financement par les bailleurs des fonds. Ceci afin d’impacter positivement la société dans la perspective de l’interface université-société. La résolution de la question des restes humains et du patrimoine culturel, par exemple, peut trouver son ancrage dans une telle vision.

À moyen terme, la vision est d’intensifier, de développer et de promouvoir les dispositifs de recherche et d’enseignement afin d’atteindre les objectifs que s’est fixés le nouveau système éducatif inscrit dans le cycle Licence Master Doctorat (LMD) , dans la transition numérique et dans la transition énergétique. Dans cette perspective, notre souhait est de mieux assurer la promotion des projets pastoraux, de mieux garantir la protection des forêts claires et denses, en installant notamment la ‘‘Tour à flux’’ à l’UNILU 2  pour être en mesure de diffuser les données et, in fine, de protéger la source du fleuve Congo.

En mettant l’accent sur la protection de l’environnement, notre ambition est d’offrir les conditions de recherche optimales à nos collègues belges venant travailler en RDC, au sein de laboratoires et observatoires implantés dans ces espaces de prédilection.

L’installation du Climatron à l’UNILU pourrait s’avérer très bénéfique pour les recherches dans ce domaine. Les problématiques post-COVID pourraient y trouver un terrain d’expérimentation précieux pour mieux investiguer sur l’une ou l’autre hypothèse soutenue à propos de cette pandémie.       

Toujours à moyen terme aussi, notre rêve est que l’UNILU s’affirme comme la meilleure université congolaise et l’une des meilleures universités en Afrique. Ce qui veut dire, une université dispensant des enseignements de qualité, promouvant une recherche qualité et offrant des services de qualité à la société.

Enfin, à long terme, notre vision est de permettre à la coopération de sortir des sentiers battus, de sortir de sa torpeur et de se libérer des pesanteurs du passé. Nous voulons une coopération toujours plus ambitieuse, plus audacieuse.

À cet effet, notre souhait le plus profond est de réaliser une autre forme de coopération avec nos deux partenaires, une coopération autrement. Une coopération qui ne se limite plus à l’appui à la formation, à l’enseignement ou à la recherche. Nous souhaitons plutôt une coopération qui, pour les décennies à venir, vienne en appui aux efforts internes de construction des infrastructures immobilières. Car l’UNILU, pour faire face au nombre croissant d’étudiant·es mais aussi aux exigences de la société actuelle et à ses enjeux, a l’ambitieux projet de se doter d’un nouveau site universitaire.

Nous avons réussi à acquérir 8000 ha destinés à abriter ce que nous avons déjà baptisé l’UNILU 2, l’UNILU du futur.

Pour l’UNILU, quelle est la plus-value de la coopération académique avec l’ARES ?

La valeur ajoutée dont l’UNILU peut se prévaloir et se dire fière, c’est la densité, l’intensité et la qualité du partenariat. Nos partenaires belges sont quasiment permanents à l’UNILU. Cela signifie que le profil de notre université correspond à la qualité exigée par les universités belges, notamment l’ULB et de l’ULiège.

Une autre valeur ajoutée, c’est aussi la qualité de la relève académique et scientifique qui, sans l’appui de l’ARES et du VLIR-UOS, n’aurait pu être assurée.

L’ARES et le VLIR-UOS ont, de manière remarquable, appuyé sur le levier de la formation et de la recherche, permettant ainsi à nos universités, à l’UNILU en particulier, de se doter d’enseignants-chercheurs de carrure internationale.

À ce propos, sans l’appui de l’ARES et du VLIR-UOS, les nouvelles facultés comme les sciences agronomiques, les sciences pharmaceutiques, la médecine et l’architecture, mais aussi les écoles de santé publique et de criminologie n’auraient pu se doter des curricula pertinents, ni disposer d’un corps académique d’une telle diversité et d’une telle qualité. Aujourd’hui, ces facultés et écoles se distinguent par des enseignant·es-chercheur·es de renommée internationale. Et nous en sommes fiers.

Enfin, la plus-value, c’est également l’appui aux infrastructures de formation académique et scientifique. Grâce à nos deux partenaires, l’UNILU reçoit chaque année, depuis 2008, un lot de 600 à 1000 titres qui font de ses bibliothèques, des centres de documentation les mieux équipés du pays.

Les équipements des laboratoires de recherche, fournis par nos partenaires belges, ont permis de développer une recherche de qualité au sein de bon nombre de facultés et écoles, offrant des services de qualité à la société environnante.

En guise de conclusion, je souhaiterais dire que le cordon ombilical n’a jamais été véritablement coupé entre l’UNILU et les universités belges. Cette relation étroite, savamment entretenue avec le concours de l’ARES et le VLIR-UOS, vaut que l’UNILU récompense ce parrainage académique, scientifique, administratif, et humain tout court, du titre de Docteur Honoris Causa. 


 

Lire aussi