Du 16 au 20 juillet 2023 s’est tenu une « école d’été », “taller” en espagnol, à Pisac organisée par l’Université nationale de San Antonio Abad del Cusco (UNSAAC), en partenariat avec l'Université de Namur, l'Université catholique de Louvain et l'Université de Liège.
Étalée sur une période de 5 jours, cette rencontre avait pour thème la présentation de méthodologies de recherche en sciences sociales. Le public était composé d’étudiantes et étudiants péruviens majoritairement issus de l'UNSAAC, mais aussi provenant d'autres universités du pays. L’objectif de l’atelier est de renforcer la formation à la recherche de ces jeunes pour leur permettre d’écrire leur mémoire.
Emmanuelle Piccoli, professeure à l’UCLouvain et à l’initiative de ce projet, explique que celui-ci a été mis en place en réponse à un besoin identifié avec ses collègues péruviens. Ce besoin consiste à accompagner les étudiantes et étudiants dans la réalisation de leurs mémoires, étant donné que de nombreux jeunes n'aboutissent pas à cette étape. « En pratique, explique-t-elle, ils sortent du système éducatif et trouvent un boulot en tant “egresado”, c’est-à-dire ayant terminé leurs études, mais pas diplômés. Ils vont ainsi travailler pendant 4, 5 ou 6 ans et ils laissent leur mémoire de côté ».
Avec ce projet, Emmanuelle Piccoli et son équipe souhaitent encourager ces jeunes à réaliser leur travail de fin d’année. « Dans le cadre du projet de l’ARES, nous avons essayé d'identifier avec nos doctorants péruviens et les professeurs péruviens, ce qu’ils pourraient apporter aux étudiants. Qu'est ce qui pourrait vraiment être utile à leur parcours d’études ? Il en est ressorti que l’accompagnement au mémoire serait le plus intéressant. » Et le projet a suscité un grand enthousiasme parmi les étudiantes et étudiants, qui ont été nombreux à soumettre leur candidature. À ce propos, Emmanuelle Piccoli constate une participation importante de filles à cette école d’été. « Nous avons trouvé cela positif parce qu'elles n'ont pas toujours accès à des lieux comme ceux-ci. »
Wendy est une jeune étudiante qui a pour sujet d’étude l’éducation interculturelle et plus précisément, l’impact de l’éducation interculturelle au sein d’une communauté indigène à l’ère du covid-19. Cette école d’été lui a permis d'élargir et mettre à jour sa connaissance des outils méthodologiques pour entreprendre sa recherche. « Confronter mon travail avec celui d’autres jeunes, précise-t-elle, me permet d’avoir de nouvelles perspectives et de nouveaux regards sur mon travail de recherche ».
Les attentes de Nurith, étudiante qui fait son mémoire sur la maternité, sont similaires: « C’est important pour moi de participer à cette école d’été pour avoir un guide sur la façon de mener mes recherches. Certes, j’ai déjà mon sujet de recherche et ma population d’études, mais il me manque le concret : comment investiguer, quelles étapes suivre etc. »
Jean, qui fait un travail de recherche sur la masculinité et l’amour, souligne aussi l'assurance apportée par cette expérience : « Le fait de parler de son sujet de travail aux autres donne plus de confiance dans ce que l’on fait et permet de mieux communiquer à son propos. »
Pour animer les échanges de ces quelques jours, Emmanuelle Piccoli est accompagnée de professeures et professeurs belges et péruvien·nes ainsi que de doctorantes et doctorants. Chacune et chacun, avec leurs compétences et spécificités, essaient d’accompagner au mieux ces jeunes dans leur réflexion.
Hanny, doctorante péruvienne à l’UCLouvain, explique : « J’aide les jeunes à passer au-dessus de leurs doutes et à se concentrer sur leur travail de recherche. Mon objectif est de contribuer à ce qu’ils puissent retirer quelque chose de productif de cette école d’été. » Nicolas Antoine-Moussiaux, professeur associé à la faculté de Médecine vétérinaire de l’ULiège, est intéressé par l’aspect personnel des recherches des étudiantes et étudiants. Pour lui, ce projet est également une opportunité d’apprentissage : « Les échanges, les questionnements et les réponses apportées par les profs m’apportent énormément. Je peux aussi découvrir le système éducatif et de recherche ici au Pérou ».
Emmanuelle Piccoli nourrit diverses attentes envers ce projet. Elle espère que les étudiantes et étudiants puissent trouver une utilité concrète à ce "taller", tout en souhaitant démystifier la recherche et leur donner une plus grande confiance en leurs capacités. Elle ajoute : « Nous avons vu, entre autres, les perspectives qui donnent davantage la parole au terrain plutôt qu'aux théories. La tendance ici au Pérou est plutôt contraire. Or, il y a une richesse interculturelle immense et il est dommage d’oublier le terrain ». Elle espère qu'ils puissent s'approprier cela et s’impliquer pleinement dans leurs recherches.
> Découvrez le reportage photo de Pauline Coppieters