Portrait de Vénérand Nsengiyumva, doctorant de l'Université du Burundi

Chaque année, l’ARES accorde des bourses à plus de 300 étudiant·es et/ou jeunes professionnel·les  provenant des pays partenaires de la coopération académique, de même qu’à des jeunes belges souhaitant effectuer leur travail de fin d’études ou un stage dans l’un des ces pays. Qui sont ces personnes ? Quels sont leur histoire, leur projet, leur rêve ? Cette campagne propose le portrait de 6 doctorant·e·s réalisant une thèse entre la Belgique et leur pays d’origine. Investissant 4 ou 5 années de leur vie professionnelle et personnelle dans une recherche approfondie, toutes sont convaincues de contribuer à des solutions innovantes pour répondre aux défis du monde actuel. Partons à leur rencontre pour découvrir leurs sujets de recherche, sonder leur motivation à sillonner le monde pour, tôt ou tard, contribuer au développement de leur pays ou de sociétés plus équitables, mais aussi écouter leurs émotions.

Aujourd’hui…

Vénérand Nsengiyumva est burundais. Doctorant de l’Université du Burundi, sa thèse est une recherche pour faire progresser la loi burundaise sur les successions. Il l’a réalise sous la direction de Christine Schaut (USLB), de Ludivine Damay (USLB) et Nicodème Bugwabari (Université du Burundi).

"Au Burundi, explique Vénérand Nsengiyumva, la question des droits de succession est un sujet sensible. Par tradition, l’héritage revient aux garçons. En 2021, les femmes ne peuvent toujours pas hériter des terres de leur père et il très rare qu’elles puissent hériter des terres de leur mari. Le projet de loi sur la succession est au point mort, ce qui fait prévaloir la coutume".

Vénérand Nsengiyumva est directement concerné par la question, des parcelles de terre familiale ayant dû être réparties suite à un décès.  C’est le point de départ de sa recherche doctorale qui porte sur la mobilisation des associations de lutte pour le droit des femmes, et l’impact judiciaire que ces revendications pourraient avoir.

"Après avoir consulté la documentation disponible, j’ai rencontré plus de 90 acteurs concernés par le sujet, des hommes et des femmes qui ont vécu des litiges de succession".

Ces personnes vont à la rencontre du monde judiciaire. Elles pensent que les juges pourront faire avancer le droit des femmes en tranchant, en faveur des femmes. Ces personnes pourront utiliser les résultats de ma thèse pour faire avancer leurs revendications. Je me suis aussi intéressé aux acteurs du monde judiciaire, c’est-à-dire les juges et les greffiers. J’ai pu collecter plus de 250 dossiers des tribunaux, dont j’exploite à présent les données. »

Pour réaliser son doctorat, Vénérand Nsengiyumva alterne les séjours entre le Burundi et la Belgique où il est inscrit à l’Université Saint-Louis de Bruxelles. "Quand je suis au Burundi, en tant qu’assistant, je dois enseigner. Parallèlement, je mène mon travail de terrain pour collecter les données. Et quand je suis à Bruxelles, je fais exclusivement du travail de recherche. Mes promoteurs ont beaucoup d’expérience. Chez moi, l’école doctorale est récente, elle date de 2017. Je me suis également inscrit à des cours ici à l’Université Saint-Louis et à l’UCLouvain. En Belgique, les chercheurs échangent beaucoup sur leur travail. A cet étage de Saint-Louis consacré aux sciences politiques, il y a des collègues, d’autres doctorants… On échange beaucoup et on parle chacun de son travail. On partage nos expériences et c’est important."

Marié et père de trois enfants, Vénérand évoque la distance qui le sépare de la famile. En 2020 et 2021, la pandémie du Covid-19 l’a également maintenu confiné dans son logement à Bruxelles de longues semaines durant. Mais les perspectives que son travail influence, à terme, les décisions de son pays sur le droit de succession  des femmes est un facteur très encourageant pour lui. 

"J’ai rencontré des fonctionnaires du Ministère de la Justice, en train de faire un travail similaire. Ils sont intéressés par l’amélioration du travail des juges, par la façon dont ils peuvent tirer profit de la jurisprudence disponible pour faire avancer certains aspects de la succession. Comme mon travail de thèse va plus en profondeur, si le Ministère de la Justice exploite les résultats de ma recherche, je pense que cela peut constituer une avancée pour les droits des femmes en matière de succession."

Dans ce témoignage vidéo, Vénérand Nsengiyumva explique ses motivations à réaliser son doctorat et l’impact que cette recherche pourrait avoir sur le développement de son pays.

 

En savoir +

Thèse : Analyse des processus de mobilisation des associations luttant pour le droit des femmes à hériter

Le doctorat de Vénérand Nsengiyumva s’inscrit dans le cadre du PFS "Appui à la création d’un master en socio-anthropologie" 2016-2020.

Promotrices et promoteur : Christine SCHAUT (USLB) et Ludivine Damay (USLB) et Nicodème Bugwabari (Université du Burundi).

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