Les tiques, une menace majeure pour le bétail en Equateur. Une recherche analyse leur résistance aux acaricides.

Depuis 2020, en Equateur, Sophie Van Wambeke (UCLouvain) et Richar Rodriguez Hidalgo (UCE) développent un projet de recherche pour lutter contre un problème émergent dans ce pays andin : la résistance des tiques du bétail aux acaricides.

En Equateur, l’élevage de bétail est un moteur de l’économie. Les éleveurs de bovins sont toutefois inquiets en raison de la résistance des tiques aux divers pesticides.

Avides de sang, les tiques prennent le bétail comme cible et, accrochées sur la peau pendant plusieurs semaines, transmettent alors diverses maladies infectieuses fragilisant le développement de l’animal et causant des pertes économiques pour les propriétaires. L’abus de produits chimiques pour les combattre a engendré une résistance aux acaricides, tout en constituant, in fine, une menace pour la santé humaine.

Quatre ans plus tard et malgré la pandémie du Covid-19 qui a perturbé le démarrage du projet, Sophie Vanwambeke (UCLouvain), promotrice belge de ce projet de recherche, est satisfaite de son déroulement et des résultats scientifiques obtenus avec le concours des chercheurs de l’Université centrale d’Equateur (UCE).  « De manière globale, nous avons beaucoup appris sur l’élevage des bovins en Equateur. Quant au projet, il affiche des résultats probants grâce à diverses études socioéconomiques et socioépidémiologiques qui ont permis de mieux comprendre l’influence des tiques et des parasites sur le bétail. Nous avons, entre autres, obtenu la confirmation de la résistance aux tiques aux acaricides, ceci grâce à la collecte d’un grand nombre de données dans plus de 70 exploitations. Ces données ont aujourd’hui été objectivées grâce au travail de l’équipe du projet. Nous avons eu l’occasion de publier les résultats dans des publications scientifiques et lors de congrès internationaux.  Nous sommes aussi en mesure de mieux gérer ce problème en tenant compte de la réalité quotidienne des petits éleveurs de bovins et de mieux répondre aux préoccupations de la population équatorienne sur ce sujet. Enfin, d’un point de vue académique, le projet a impliqué une petite dizaine d’étudiants du premier cycle mais a aussi et surtout permis de réaliser deux thèses de doctorat qui sont en voie de finalisation. »

La these de Ximena Perez (UCE / UCLouvain) porte sur la “Géographie des tiques et des maladies transmises par les tiques sur le bétail”. « Mon travail, explique Ximena, consiste à mieux connaitre les tiques, considéré comme l’ennemi des éleveurs. Je me suis intéressé à la biologie des tiques, à la manière dont elles affectent le bétail mais aussi à leur localisation sur le sol équatorien.»

Pour sa part, Valeria Paucar (UCE / ULiège) s’est penchée sur l’"Impact socio-éco-épidémiologie des tiques et des maladies à tiques sur le bétail.” « Mes recherches analysent les facteurs de risque d’infection par la résistance, précise Valeria. Ils analysent aussi le volet économique de ces infections pour les éleveurs.  En effet, la qualité du lait et de la viande peut être affectés par les infections. Un volet de mon étude porte aussi sur le contrôle des tiques, au sein même des fermes.»

Pour Richar Rodriguez Hidalgo, professeur à l’UCE et promoteur équatorien du projet, « les études de Valeria et Ximena vont nous aider dans la meilleure compréhension des tiques, qui sont considérés comme une problématique majeure en Equateur.  Actuellement, ils sont traités chimiquement et les fermiers peuvent acheter les produits chimiques directement en pharmacie, sans recommandations spécifiques. Notre projet apporte des alternatives dans le contrôle et la prévention. Cela va aussi aider les autorités sanitaires qui assurent la gestion des politiques publiques en la matière. A notre niveau, nous allons aussi nous exploiter les connaissances pour développer une plateforme d’interaction avec les autorités.»

Une publication - « Garrapatas – Control integrado » - a été éditée début 2024. Aux côtés des chercheur·es belges et équatoriens, Valeria et Ximena ont contribué à sa rédaction et assure aussi sa diffusion auprès des communautés d’éleveurs. « Cette publication, précisent-elles, s’adresse prioritairement aux éleveurs des zones directement affectées par la présence des tiques mais peut aussi concerner les élevages des zones tropicales et subtropicales soucieux de mieux connaitre la problématique. Notre approche est didactique et pédagogique. Les visuels et le vocabulaire ont été choisis pour que l’information passe bien auprès des éleveurs. La publication est divisée par thèmes et couvre les volets chimiques, biologiques et économiques. Nous avons fait appel à des vétérinaires, des agronomes, des biologistes, des entomologistes… Jusqu’à présent, sa diffusion a principalement été faite dans la province de Pichincha, ciblée par nos recherches. »

Au-delà des éleveurs, Richar Rodriguez Hidalgo mentionne aussi l’intérêt des vétérinaires et des autorités sanitaires. Pour diffuser les connaissances et partager les recommandations pratiques issues des nombreux échanges avec les éleveurs, une tournée de sensibilisation est prévue dans les zones les plus touchées. Il évoque également une diffusion internationale car la problématique peut intéresser les chercheur·es en Afrique et en Asie. Des contacts sont aussi établis avec la FAO.

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